Le Christ Roi

Christ-Roi_theme_image.jpgAu terme de l’année liturgique, l’Église célèbre, au trente-quatrième dimanche du Temps ordinaire, la solennité du Christ Roi. Le point de départ de la présente méditation réside dans une impression que peut laisser le titre de cette fête. Peut-être, à l’occasion, chacun s’est-il fait la même réflexion que lorsqu’on énonce le nom de cette fête, le Christ Roi, on a la sensation d’une tautologie, comme si on disait deux fois la même chose. Christ et Roi ces deux vocables ne se recouvrent-ils pas ? On repense aux foules de Jérusalem acclamant Jésus entrant dans la ville : « Hosannah au Fils de David ». Roi et descendant de roi.

Il faut, de toute façon, faire droit au titre de la fête et y regarder à deux fois. Lorsque l’on dit Christ, on dit oint. C’est-à-dire porteur de l’onction. Or, l’onction peut revêtir plusieurs sens. Ainsi on pourrait de la même manière penser au Christ prophète ou au Christ prêtre. C’est toute la richesse de ce vocabulaire et de la symbolique de l’onction qu’il faut envisager pour entrer dans le mystère de ce jour. Par là se donne à comprendre le mystère du Christ et celui de ceux qui, à sa suite, portent l’onction. N’est-il pas vrai que lors du baptême, après l’immersion dans l’eau, vient le moment d’être marqué du saint-chrême ?

Il faut donc effectuer un parcours qui nous fasse pénétrer ce qui demeure au cœur de cette célébration : la Seigneurie du Christ sur l’univers. De quelque manière, la fête du Christ Roi, comme nous l’avons déjà laissé entendre, nous renvoie au jour des Rameaux. Elle en est le lointain écho, disons qu’elle peut être comprise comme le rappel de ce que le dimanche des Rameaux donnait à contempler.

Nous allons développer notre réflexion en commençant par le prophétisme, en continuant par le sacerdoce pour conclure par la royauté. Ce choix nous est suggéré par les différents aspects du ministère épiscopal. En effet, les évêques pour relayer, selon la mission apostolique qui leur échoit, le ministère du Seigneur Jésus et de ses apôtres, ont charge d’abord de prêcher l’Évangile, de célébrer les sacrements et de gouverner l’Église. Faut-il encore insister sur l’importance déjà rappelée de l’onction baptismale qui donne à quiconque la reçoit d’avoir part au mystère du Christ, prêtre, prophète et roi ?

Le Christ, prophète

Le Christ est d’abord venu pour prêcher. Il est, selon une expression consacrée, « passé en faisant le bien ». Et cela, il l’a fait d’abord par la parole, par la prédication. Il a emboîté le pas à la prédication prophétique dont la dernière voix était son propre cousin : Jean le Baptiste. Mais il était plus qu’un prophète. Il était lui-même l’accomplissement des prophéties. Son autorité surclassait de loin celle des représentants les plus éminents de la tradition prophétique. Mais pour ses contemporains, la parole de Jésus rendait le même son que ses

prédécesseurs. Elle avait toutefois son timbre propre dans lequel on discernait non pas une parole de seconde main, une parole ou une autorité déléguée, mais une parole source. Il est de Jésus qu’il « parlait avec autorité ». Non pas comme les docteurs de la Loi, les scribes, les pharisiens ou les prophètes. On a pu aller jusqu’à dire que « jamais homme n’avait parlé comme cet homme ».

Importante donc la parole source et souveraine du Christ. Mais que disait-elle ? Elle reprenait à son compte une longue tradition de prédication qui visait à encourager tous les hommes à marcher dans les voies du Seigneur et à pratiquer la justice. La parole prophétique, en effet, n’avait pas d’autre objet que d’initier à la grâce, à la gratuité, au don gratuit. Lorsqu’il paraît, Jésus n’a pas d’autre message. Il aura, en revanche, la particularité d’inscrire à la perfection la parole qu’il prêche dans sa propre vie. Ultimement, il indiquera, comme Loi définitive de la vie humaine, la loi de l’amour. Il imposera de reconnaître comme unique critère d’évaluation de l’agir humain ce qu’on appelle la charité. Ce mot, malheureusement trop démonétisé, ne désigne pas autre chose que l’amour gratuit auquel Dieu appelle tout homme.

Le Christ, prêtre et offrande

Le moment où se consomme la prédication du Christ, dans un geste ineffaçable et sans faille, c’est le moment de sa propre offrande. Le mystère pascal est le sceau de Parole donnée au cours des longues marches du Messie. « Nul n’a plus grand amour que celui-ci : donner sa vie pour ses amis. » S’ensuit le commandement et le testament du Seigneur : « Comme je vous ai aimés, aimez-vous les uns les autres. » Le moment de cette offrande de soi est le moment proprement sacerdotal de la vie du Christ. Notons en passant que le pape Jean-Paul II dans son encyclique sur l’eucharistie a souligné que si l’eucharistie est vraiment sacrifice, c’est parce que le Christ s’y est véritablement et sans réserve livré.

Le Christ, roi au service de l’amour

L’évangéliste Jean a pris la peine de rapporter non pas l’institution de l’eucharistie mais la scène du lavement des pieds. C’est encore là-dessus que s’arrête la contemplation liturgique de l’Église au soir du Jeudi saint… Les commentaires s’effacent devant la parole du Maître : « Vous m’appelez Maître et Seigneur et vous avez raison car je le suis. Si donc moi, le Seigneur et le Maître, je vous ai lavé les pieds, vous devez vous aussi vous laver les pieds les uns aux autres. » À l’occasion, tel ou tel passage de l’Évangile peut nous revenir à la mémoire où le Seigneur Jésus rappelle à ses disciples que le Royaume n’a d’autre loi que celle de l’amour gratuit et du service du prochain.

Ainsi la parole du Christ à longueur de prédication est scellée par son acte d’auto-offrande. Le pouvoir qu’il exerce ne prend jamais d’autre forme qu’une parole proposée, offerte. Il invite à

entrer en dialogue. Il parle pour inviter au don. Pour initier à la grâce. Tel est le Seigneur de l’Église : un Maître Serviteur. Exemple et zélateur de charité. Discret cependant : il n’offre que ses mots, ses gestes et sa propre oblation.

Les sujets de ce Roi étonnant ont vocation à vivre pour eux et à faire régner dans l’univers la singulière Seigneurie d’amour et de service qu’ils ont en partage avec le Christ. La croix, c’est-à-dire le don, est le seul signe qui puisse porter les hommes à reconnaître et accueillir le Royaume qui vient.

Puisse la grâce de cette fête inonder le cœur de tous ceux qui confessent le Christ Roi.

Frère Augustin Pic

 

Source : http://www.liturgiecatholique.fr/Le-Christ-Roi.html?artsuite=2

http://www.esprit-et-vie.com

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