TRIBUNE Christophe Robert : "Une autre politique du logement est possible"


Alors que la France subit de plein fouet une vague de froid hivernale, le sociologue Christophe Robert, délégué général adjoint de la Fondation Abbé Pierre, publie une tribune sur lavie.fr pour alerter sur la situation très préoccupante du mal-logement en France. Et rappelle le principe du "contrat social" soumis par la Fondation aux candidats à la Présidentielle, pour que le logement soit une priorité absolue de leur politique.

6 millions de personnes en France sont affectées d'une manière ou d'une autre par la crise du logement © Jean-Philippe Ksiazek / AFP

6 millions de personnes en France sont affectées d'une manière ou d'une autre par la crise du logement © Jean-Philippe Ksiazek / AFP

 

« En cette période de froid intense, resurgit, comme chaque année, la prise de conscience collective sur le fait que vivre à la rue est bel et bien une réalité pour nombre de nos concitoyens. Ce constat glace le sang. Pourquoi attendre que le thermomètre descende sous la barre du « zéro » pour reconnaitre que nombreux sont ceux qui ne disposent pas d’un toit et qu’il s’agit là d’un échec insupportable pour un pays riche comme le notre.

Notre pays compte aujourd’hui 3.6 millions de mal-logés dont près de 700 000 personnes sans domicile personnel. Et ce n’est pas tout ! Au-delà de ces situations aigües de mal-logement, on compte plus de 6 millions de personnes fragilisées d’une manière ou d’une autre par la crise du logement : des familles dans des logements surpeuplés, des personnes en situation d’impayé de loyer qui vivent sous la menace permanente d’une expulsion…

Comment a-t-on pu en arriver là ? Un double phénomène est en jeu : parallèlement à la fragilisation des ressources (perte d’emploi, fin de droit à l’indemnisation chômage, temps partiels contraints…), le coût du logement n’a cessé de flamber ces dix dernières années (doublement des prix de l’immobilier, augmentation de 50% des loyers de relocation, flambée des charges). Alors évidemment ça ne passe plus : de nombreuses personnes à la rue y restent ou s’abritent dans un gymnase le temps d’une nuit, certains n’ont pas d’autres perspectives que de s’installer dans un camping, d’autres s’entassent dans des logements insalubres…

En fin de compte, chacun se débrouille comme il le peut, fait le dos-rond ou fait appel à la solidarité de proximité (l’hébergement chez des proches s’est fortement développé ces dernières années). On peut ajouter à ce triste tableau d’autres conséquences moins visibles mais tout aussi préoccupantes. Quand des ménages consacrent 40, voire 50% de leur budget pour se loger ils doivent inévitablement faire des économies sur d’autres postes de dépenses pourtant indispensables (alimentation, santé...). C’est aussi cette flambée du coût du logement qui fait que 3.8 millions de ménages sont aujourd’hui en situation de précarité énergétique et souffrent parfois du froid faute de pouvoir isoler leur logement ou payer la facture de chauffage.

Et pourtant, une autre politique du logement est possible. C’est le message que la Fondation Abbé Pierre a voulu faire passer le 1er février en invitant les candidats à l’élection présidentielle à signer un "contrat social" pour une nouvelle politique du logement. Par la mise en œuvre de ce contrat, la Fondation appelle à changer radicalement d’orientation et faire du logement une priorité absolue en partant du principe que, permettre à chacun de disposer d’un logement adapté, aura des répercussions bien au-delà : santé, scolarisation, autonomie des jeunes, pouvoir d’achat, emploi (relance du secteur de la construction) et environnement (le bâtiment étant l’un des principaux consommateurs d’énergie). Maintenant que la plupart des candidats déclarés ont signé ce contrat, reste désormais à s’assurer qu’il sera effectivement mis en œuvre. »

Christophe Robert, sociologue, Délégué Général Adjoint de la Fondation Abbé Pierre

Source : La Vie
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